Des traces d'une famille de castors sont observables le long de l'Aubonne.
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Chassé par l'homme jusqu'à la fin du XIX e siècle, le castor a presque totalement disparu d'Europe. Sa fourrure, sa sécrétion (le castoréum), sa chair et sa queue, considérée comme délicatesse, ont fait de lui un appât très prisé. Après avoir totalement disparu durant 100 ans de Suisse, le castor a refait son apparition en 1958. Cette année-là, pour la toute première tentative, il est réintroduit dans les marais de la Versoix. Entre 1971 et 1975, 21 castors, en provenance du sud de la France, sont relâchés dans le canton de Vaud. Mais environ la moitié de toutes les arrivées ne survivent pas dans leur nouvel environnement. Toutefois, petit à petit, les castors y arrivent et se développent. Sur La Côte, des territoires allant de 500 m à 3 km, où vivent des familles d'en moyenne cinq individus, ont été observés le long de la Versoix, de l'Aubonne et aussi du Boiron de Morges.
Robin Séchaud, biologiste et vice-président de Beaverwatch, l'Association pour l'intérêt et le suivi du castor en Suisse, aime aller à la rencontre de cet animal. Ce mammifère est très discret et il est rare de l'apercevoir. Le plus aisé, c'est à la tombée de la nuit. Cependant, en étant attentif, ses traces sont visibles, bien qu'en été elles soient vite recouvertes par la végétation. Par exemple, le long des berges du barrage de l'Aubonne, en contrebas du chemin, plusieurs troncs jonchent le sol, dont certains taillés en pointe à leur base, signe distinctif du travail de ce rongeur. Sur l'un des morceaux de bois, des dizaines de petites encoches décorent l'écorce, ce sont les traces des dents des castors. A l'aide d'une réglette, le biologiste, bénévole dans cette association, peut déterminer s'il s'agit des entailles d'un jeune ou d'un adulte.
De l'autre côté de l'étendue d'eau, une ligne à travers l'herbe mène du lac à un étang. Le castor apprécierait-il de se baigner dans la mare? "Il vient sûrement là pour ronger et manger l'écorce tranquillement" , pense Robin Séchaud.
Par contre, pas de huttes à l'horizon. C'est surtout l'espère canadienne qui entasse de manière réfléchie les bois pour créer des barrages. Le castor suisse (castor fiber) en construit également, mais de moindre importance, il a plutôt tendance à creuser son terrier dans la berge. Il a besoin d'au minimum 60 centimètres d'eau pour se sentir en sécurité. Pour sa couche, cet animal transforme une partie du bois en fines lamelles de paille.
Si la présence de ce végétarien est davantage évoquée lorsqu'il occasionne des dégâts dans des vergers, l'homme oublie souvent que le castor transforme la biodiversité des berges. "En rongeant de gros arbres, il favorise le développement de milieux ouverts, propices à des espèces de plantes, d'oiseaux, de batraciens, de libellules et de papillons. Le castor crée ainsi une zone de transition entre la forêt et le plan d'eau" , explique Robin Séchaud. Alors que l'homme tente de renaturiser des berges, le plus gros rongeur d'Europe s'en occupe naturellement et gratuitement.
Infos et détails sur www.beaverwatch.ch
FABIENNE MORAND (TEXTES ET PHOTOS)